Le débat sur la dette extérieure de la Côte d’Ivoire est très virulent sur la place publique. Et on devine bien que lors de la campagne pour les élections présidentielles, ce sujet va animer la campagne des uns et des autres. C’est ainsi que M. Luc Eyraud, Directeur des études régionales du Fonds monétaire international (FMI) pour l’Afrique subsaharienne, lors d’un récent entretien donné à l’agence Ecofin a souligné où se situait, selon lui, la vraie problématique de la dette contractée par les pays d’Afrique subsaharienne dont la Côte d’Ivoire.
Selon Luc Eyraud, « le problème ce n’est pas la dette, je vais le dire de façon provocatrice. Le problème c’est la charge de la dette ». M. Eyraud a affirmé que le niveau de dette de l’Afrique subsaharienne, c’est 60% du PIB et ce n’est pas très haut d’un point de vue international. « Par contre, les charges d’intérêt de la dette en part des revenus générés par l’Etat, ça c’est très important et bien plus important que dans les autres pays », explique-t-il. Il affirme que cela veut dire que c’est le coût de la dette qui pose un problème, plus que le niveau de la dette. Et il donne cet exemple : « Il y a une dizaine d’années, quand on prenait les intérêts payés par les États sur la dette et on divisait ça par leurs recettes fiscales, c’était 5%. Aujourd’hui c’est 12%. C’est 3 à 4 fois supérieur à ce qu’il y a dans un pays avancé ». Pour Luc Eyraud, quand on a des charges d’intérêt très fortes, dans certains pays ça absorbe un quart des recettes publiques. « C’est autant qu’on est obligé de couper sur des dépenses fondamentales d’éducation, de santé. Donc avoir une dette modérée, ce n’est pas quelque chose qui est imposé par les organisations internationales ou par les bailleurs. C’est dans l’intérêt des pays africains de garder une dette modérée pour ne pas avoir à faire des choix catastrophiques, comme parce que la dette est trop élevée et parce que la charge d’intérêt est trop élevée, devoir couper des dépenses essentielles, des dépenses sociales, couper sur les infrastructures, couper les dépenses qui vont aux écoles », souligne-t-il.
Il affirme que c’est un bon point le fait qu’une partie de la dette d’Afrique subsaharienne est concessionnelle. « Mais généralement, elle à une durée, une maturité assez longue et des taux assez bas. C’est une très bonne chose d’un point de vue du coût de la dette », a précisé le Directeur régional du FMI pour l’Afrique subsaharienne. Et de dire que le problème, c’est que cette dette concessionnelle a tendance à se raréfier parce que les bailleurs ont tendance à réduire leurs engagements pour des raisons diverses. « Mais l’aide publique au développement est en baisse en part du PIB africain. Et donc, on ne peut plus pas non plus s’attendre à toujours avoir accès à cette dette peu chère et à long terme », prévient-il. Il a terminé en soulignant que malheureusement beaucoup d’États puisqu’ils ont moins accès à ce type de dette, se sont tournés vers des dettes, notamment de la domestiques qui coûtait plus cher et qui avait des maturités plus courtes.
Dodo Wlapkè
Photo légendée : Luc Eyraud, Directeur des études régionales du FLI pour l’Afrique subsaharienne.